Articles de laurence-chenou

2 cerveaux

Conte oral et pensée mathématique : Entre intuition et réflexion

Par Le 17/05/2025

2 cerveaux

 

Selon Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie et auteur du livre  "Système 1 - Système 2" , notre cerveau fonctionne à deux vitesses :

Le système 1 est rapide, automatique, intuitif. Il intervient sans effort, en s’appuyant sur des impressions, des habitudes ou des émotions. C’est lui qui nous fait reconnaître une forme familière ou répondre sans réfléchir à « 2 + 2 ».

Le système 2, à l’inverse, est lent, réfléchi, logique. Il demande de l’attention, mobilise la mémoire de travail, et s’active lorsqu’on doit résoudre un problème complexe ou évaluer une situation nouvelle.

Nous avons besoin des deux pour penser efficacement. Dans un contexte d’apprentissage, il est crucial de savoir passer de l’un à l’autre : partir de l’intuition (Système 1), puis prendre du recul, analyser, et structurer sa pensée (Système 2).

Comment le conte et les mathématiques procèdent-ils au regard de ces deux systèmes de pensée ? 

On pourrait penser que le conte oral, par sa nature narrative et symbolique, mobilise avant tout le système 1 : 

  • Il capte l’attention par l’émotion, les images, les rythmes.
  • Il repose sur des structures familières : le héros, les épreuves, la répétition.
  • Il emmène clairement l'auditeur dans un monde imaginaire, et se situe ainsi dans un registre d'attention proche de la rêverie. 

Cependant, bien vite, le héros doit mettre en place.... Son système 2 ! Sinon, il construira sa maison avec de la paille, parlera mal à la vieille femme qui détient pourtant des informations précieuses pour lui....les situations évoquées dans les contes, non seulement montrent l'importance d'une pensée raisonnée et construite, mais invitent l'auditeur à construire sa propre pensée logique.  Ainsi, "au fil du conte", le cerveau bascule  naturellement , presque sans y penser, vers le système 2. En cela, écouter un conte contribue à "préparer" l'activité mathématique. 

Celle-ci, pour sa part, s'inscrit clairement dans le système 2. Sauf que privée d'idée, d'intuition, d'esprit d'intiative, la recherche n'avance pas. Les mathématiques ont fondalementalement besoin de la dimension imaginaire et de l'intuition pour se développer. Et l'intuition, les représentations mentales, les analogies  qui ont lieu dans la recherche mathématique puisent leur source dans le système 1. 

En amenant les élèves à réfléchir sur les problèmes posés par le récit, c'est à dire en alliant sciemment le conte et les mathématiques, on invite les élèves, peut-être, à developper leur pensée analytique, leur logique et leur capacité d’abstraction sans pour autant étouffer la part un peu magique, intuitive et féconde, du système 1. 

 

 

Systeme 1 systeme 2

 

Note : 

Le film de Matthew Brown, "L'home qui défiait l'infini" qui retrace la vie du mathématicien indien Srinivasa Ramanujan, illustre parfaitement, à mon sens, les deux modes de pensée décrits par Daniel Kahneman.

Ramanujan est l’archétype du penseur intuitif. Sans formation académique formelle, il découvre, invente, devine des formules mathématiques d’une beauté et d’une profondeur stupéfiantes, souvent sans démonstration. Il dit recevoir ses idées en rêve, ou comme des révélations. Sa pensée est fluide, spontanée, connectée à une intuition presque mystique des nombres.

 Il incarne donc le Système 1 : rapide, associatif, non verbal, mystérieusement fécond.

 G.H. Hardy incarne la tradition universitaire européenne, fondée sur la discipline du raisonnement. Il exige des démonstrations, il fonctionne par logique, structure, preuve, méthode. 

 Il est le représentant du Système 2 : lent, méthodique, critique, structurant.

 Le film montre la rencontre de ces deux hommes. Dans un premier temps ils se heurtent et s'opposent mais quand ils arrivent à travailler ensemble, chacun des deux apprend de l'autre et arrive à se dépasser

Ramanujan donne à Hardy accès à un monde d’idées et de formules qu’aucun esprit analytique pur n’aurait pu inventer seul. Hardy donne à ces idées la structure, la démonstration et la reconnaissance scientifique nécessaires pour qu’elles soient intégrées au corpus des mathématiques.

Le duo Ramanujan-Hardy symbolise ce que notre propre esprit peut accomplir lorsque nos deux systèmes — intuition (1) et raison (2) — coopèrent :

L’un imagine, explore L’autre vérifie et organise. Ensemble, ils ouvrent des portes que ni l’un ni l’autre ne pouvait franchir seul.

Le conte, comme l’intuition de Ramanujan, ouvre un espace imaginaire, fertile et symbolique. Les mathématiques, ou l'esprit scientifique en général, vient vérifier, puis structurer cette intuition. 

Comme Ramanujan et Hardy, dans un aller-retour entre inspiration et démonstration, entre système 1 et système 2, le conte et les mathématiques dialoguent. 

L homme qui defiait l infini

 

Mythes et Maths, projet Erasmus +

Par Le 24/01/2025

Projet Erasmus + "Myths et Maths"

Un projet international autour des contes et des mathématiques

Projet Erasmus + Myths et Maths

Par Le 05/12/2024

Des contes et des mathématiques dans un projet Erasmus +

Journée d'échanges et de réflexion du conte et des mathématiques

Par Le 23/11/2024

Journée de Formation autour du conte oral et des mathématiques aux Ateliers de la Rue Raisin à Saint Etienne. 

Sieste contée à Faray, avec les chuchoteurs d'histoires

Par Le 30/10/2024

Sieste contee mai 24 groupe

Siste contee mai 24

Sieste contée, en mai 2024, à Farnay, avec le groupe des chuchoteurs d'histoires. Un public nombreux et attentif.